JEROME GUITTON – LECTURES DANS LA SOLITUDE DE L'ECRITURE

Sur Lignes – 2.2/ Texte – “coup” rythmiquement en position d’exception

Filed under: analyses — jeromegu @ 06:34

(sommaire) (précédent) (suivant)

L’analyse rythmique n’est ici qu’un outil ; elle permet de montrer un aspect de la singularité du mot coup dans la phrase considérée :

  1. Quasiment toutes les positions sont marquées. On trouve même une succession de 8 accents sur (en)tre mille cinq cents musulmans qui pourrait même être étendu à 10 si l’on comptait le “e” de “de visiter” pour muet.
  2. Par ailleurs, pourquoi n’a-t-on pas compté ce e pour muet ? Pour conserver son assonance avec le “e” de l’autre monosyllabe du vers (me). Ce qui permet d’introduire la deuxième propriété remarquable de ce vers : l’importance des séries vocaliques : paires de i, u, in, an, é, e ; seules deux syllabes du vers échappent à cette loi.
  3. Troisième propriété du vers, en symétrie de la précédente : l’abondance des séries consonantiques (d’abord en m ; puis en t ou tr, s, z, l). Ici encore, seules deux syllabes échappent à ce couplage.
  4. En conséquence de cette surcharge prosodique, on est frappé par le couplage très fort de certains groupes : mille cinq cents et musulmans en particulier, qui on en commun des m de début de syllabe, des l terminant ; l’inertie prosodique tend même à y coupler s et z. Même chose pour musulmans et visiter (usu/isi) ; musulmans et mètre me
Dans ce contexte, coup se singularise-t-il ? Si on reprend chaque propriété :
  1. coup est marqué rythmiquement (finale de groupe rythmique) ;
  2. le phonème vocalique ou n’apparaît nulle part ailleurs dans le vers ;
  3. le phonème consonantique k n’apparaît nulle part ailleurs dans le vers ;
  4. en conséquence, coup n’apparaît dans aucun couplage prosodique ;
on pourrait éventuellement relever un couplage graphique entre me coup et mille cinq, par les signes consonnes m et c… mais ce serait oublier que mille cinq cents n’est pas écrit en toutes lettres dans l’oeuvre elle-même. C’est 1500 que nous lisons. Donc, de toutes les propriétés rythmiques du vers, seule une (le marquage rythmique) est conservée dans coup. Voilà qui nous rassure : ce mot est objectivement en position d’exception.

Comments are closed.